Parmi les trois clubs qui font partie de la galaxie Blue Crow à ce jour*, et sans vouloir manquer de respect aux Mexicains du Cancún FC ou aux Doubaïotes de l'Elite Falcons FC, le CD Leganés est celui qui intéresse le plus les supporters « Ciel et Marine ». Basé dans l'agglomération de Madrid, il est celui qui se rapproche le plus de « leur » HAC. Et donc en analysant la manière dont le groupe américain s'occupe de la structure ibérique, on peut potentiellement en tirer quelques indices sur le futur mode de gouvernance du doyen du football français. Tout d'abord, hormis la parenthèse de quatre saisons consécutives, de 2016 à 2020, en Liga, « los Pepineros », comme on les surnomme de l'autre côté des Pyrénées, sont historiquement des pensionnaires des deuxième et troisième divisions espagnoles, qu'ils ont fréquenté respectivement pendant 16 et 15 années, de 1987 jusqu'à son rachat par BCSG, en juillet 2022 pour la modique somme de 39 M€ !
*Bien que promu en D1, le MFK Vyskov est sorti du giron de Blue Crow Sports Group au mois de mars ; le club tchèque n'ayant pas de stade aux normes ne peut plus prétendre à évoluer dans les championnats professionnels de son pays. Les droits sportifs ont été transférés à Pribam, à 250 km.
Le maintien des hommes en place... au moins dans un premier temps
Contrairement à de nombreux investisseurs quand ils acquièrent un club, le groupe co-fondée par Jeff Luhnow n'a pas procédé à une révolution. Que ce soit Jorge Broto, le directeur de l'académie, Martin Ortega, le directeur général, ou encore Txema Indias, le directeur sportif, les principaux responsables des « Bleu et Blanc » ont conservé leurs prérogatives. "Jeff (Luhnow) et ses associés ont apporté leur façon de travailler, leurs méthodes, mais ils ne sont pas arrivés avec la volonté de tout bouleverser. Ils ont regardé comment tout le monde fonctionnait", rapportait Txema Indias dans un article du média The Athletic, en août 2024. Il faut dire qu'il aurait été difficile pour Blue Crow de se séparer d'entrée de ce dirigeant historique ; ce dernier bénéficiant d'une incroyable aura dans la communauté « Pepinero » pour avoir contribué à la construction de l'équipe qui a décroché la première accession de l'histoire du club en Liga, en 2016.
Un statut qui n'est pas sans rappeler celui d'un certain Mathieu Bodmer, avec moins d'ancienneté tout de même. D'ailleurs, si l'on se fie aux propos de Vincent Volpe, le BCSG ne devrait pas non plus tout chambouler en posant ses valises dans la cité Océane. "Ils viennent pour aider et bâtir sur ce qui existe, pas pour casser", rassure le possible futur ex-propriétaire du HAC dans les colonnes de L'Equipe. Toutefois, il convient de préciser que même les plus belles aventures ont une fin et Txema Indias n'est plus en poste au CD Leganés depuis une poignée de semaines. Alors qu'il se trouvait au terme de son contrat, la décision a été prise de ne pas continuer avec lui.
Peu d'investissements lors des mercatos
En se basant sur le modèle du CD Leganés, les supporters « Ciel et Marine » ne doivent pas s'attendre à des investissements massifs lors du mercato. Durant sa première saison sous la bannière Blue Crow, en 2022-2023, le club espagnol a enregistré 12 recrues, que des joueurs libres ou prêtés (source Transfermaket). Peu du goût des fans locaux, cette frilosité sur le marché des transferts aurait pu coûter cher ; « los Pepineros » ne validant leur maintien en D2 que lors des dernières journées. Une absence de résultats qui a été fatale au coach Imanol Idiakez, licencié au mois d'avril après avoir été installé sur le banc au début de cet exercice. Cependant, cette prudence en termes d'achat de joueurs de la part du groupe américain de Jeff Luhnow peut s'expliquer par la situation financière des « Bleu et Blanc » avec un déficit avoisinant les 7 M€ avant l'arrivée du BCSG. Un contexte économique assez similaire à celui du HAC.
Néanmoins, ce n'est pas parce qu'on n'a pas d'argent (ou peu) que les performances sont impossibles. Le club doyen est bien placé pour le savoir depuis trois ans. Le CD Leganés aussi. La saison suivante, en 2023-2024, en se montrant guère plus dépensier (600 000 €), mais avec un effectif largement renouvelé (une quinzaine de renforts pour presque autant de départs), les joueurs désormais entraînés par le jeune Borja Jimenez se sont installés dans le fauteuil de leader dès la 12e journée pour ne quasiment plus le lâcher, décrochant le premier titre de champion d'Espagne de D2 de leur histoire.
Même avec la promotion en Liga, Blue Crow n'a pas activé le mode illimité de son compte en banque avec 3,81 M€ répartis sur quatre éléments ; « los Pepineros » disposaient d'ailleurs de l'une des masses salariales les plus faibles de la Liga espagnole. Même s'ils se sont battus jusqu'au bout (un point de retard sur le premier non-relégable, le Séville FC), leur descente au mois de mai n'a donc pas constitué une énorme surprise. Pour en revenir aux finances, sur les trois premiers exercices de la gouvernance Blue Crow, les « Bleu et Blanc » affichent une balance des transferts positive d'1,59 M€, notamment grâce à la vente de Diego Condé à Villareal pour 4 M€ à l'été 2024 ; un gardien arrivé libre un an auparavant. Une belle opération financière que Jeff Luhnow et ses collaborateurs seraient bien inspirés de rééditer en Normandie s'ils sont amenés à prendre le contrôle du HAC.
"Si le football n'était qu'une question de chiffres, il n'y aurait pas besoin d'entraîneur. Vous devez savoir comment les interpréter. Il y a des aspects du jeu qui ne peuvent être comptés : les expériences quotidiennes, les relations personnelles"
Borja Jimenez, le coach du CD Leganés sur l'utilisation de la data, omniprésente dans l'approche footballistique de Blue Crow