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Au Malherbe, les touches, plus qu'un détail

Sous le regard du coach Pascal Dupraz, Yoël Armougom, l'un des préposés à cet exercice, et les Caennais possèdent une marge de progression conséquente sur les touches. ©Damien Deslandes

Sous le regard du coach Pascal Dupraz, Yoël Armougom, l'un des préposés à cet exercice, et les Caennais possèdent une marge de progression conséquente sur les touches. ©Damien Deslandes

Nous entendons souvent qu'un match de football se joue sur des détails. Les touches appartiennent à cette catégorie qui peut faire basculer une rencontre vers une victoire ou une défaite. Cette saison, lors de la 1re journée, au Stade Gabriel-Montpied, à Clermont, le Stade Malherbe a perdu 15 ballons suite à cette phase de jeu sur les 33 obtenues, soit un taux de réussite de seulement 55%. Du jamais-vu du côté des « Rouge et Bleu » depuis au moins cinq ans. Les pertes de balles consécutives aux touches représentaient 13% de la totalité des ballons perdus par le club caennais. Dans le football moderne, ces actions arrêtées sont devenues un véritable enjeu. Une perte de balle suite à une touche a les mêmes conséquences qu'après une passe ratée. Au lieu d’attaquer, ce sont les adversaires qui prennent possession du ballon et qui bénéficient d’une opportunité de scorer sans que la formation qui a remis en jeu ne soit organisée.

Le Liverpool de Jürgen Klopp a recruté un entraîneur spécialisé dans ce domaine

Les touches constituent incontestablement plus que des détails ou des gains marginaux lorsqu’on sait qu’au cours d’un match, il y en a environ entre 40 et 60 et que les équipes mettent entre 15 et 20 minutes à remettre le ballon en jeu. Le Liverpool de Jürgen Klopp l’a bien compris en recrutant en 2018 Thomas Gronnemark, entraîneur spécialiste… des touches. Après avoir œuvré dans le championnat danois, ce dernier a permis aux Reds d’améliorer leurs remises en jeu sous pression en passant de 45,4% de réussite à 68,4%. Lors de la saison 2019-2020, les partenaires de Jordan Henderson ont marqué 13 buts suite à des touches offensives et trois de plus sur des touches défensives de leur adversaire en appliquant un pressing spécifique.

Si Thomas Gronnemark avait visionné la confrontation entre Clermont et le Stade Malherbe (J1. 0-0, le 22 août), il aurait sûrement hurlé devant la stratégie caennaise sur cette phase de jeu ; les lanceurs normands gaspillant de nombreuses munitions en envoyant le ballon le long de la ligne. Peu mobiles et coincés dans cette zone du terrain, les hommes de Pascal Dupraz ont éprouvé les pires difficultés à conserver le « cuir » et l’ont rendu à de trop nombreuses reprises. A la lecture de ces touches, on pouvait supposer une directive prudente du coach savoyard, préférant perdre le ballon 30 mètres plus haut en coinçant les Auvergnats le long de la ligne plutôt que de prendre le risque de le perdre plus près de son camp avec une possibilité de contre-attaque offerte à leurs adversaires. On peut émettre l'hypothèse que Jürgen Klopp et ses joueurs auraient procédé à un choix différent. Avec le soutien de leur coach spécifique, les touches anglaises reposent désormais sur trois fondamentaux : la longueur, la rapidité et l’intelligence.

Si 50% des touches exécutées sous pression sont perdues au haut niveau, c’est avant tout parce que les joueurs s’entraînent rarement à cette phase de jeu. Le premier travail à réaliser est de pouvoir envoyer le « cuir » plus loin car plus la zone de lancer est grande, plus l'espace est important et plus vous avez de chances de conserver la possession. Sans séance spécifique, un joueur lance à environ 25 mètres et aura une aire de lancer de 981 m2. Après avoir « bossé », il peut espérer gagner jusqu’à dix mètres et doubler son aire ! Les joueurs qui ont de longs bras ou qui sont très souples ou encore qui ont des fibres musculaires rapides, sont avantagés. Mais il ne suffit pas de lancer loin, il faut aussi savoir bien le faire. La précision d’une touche est importante. Alors que le ballon part de plus de deux mètres de haut, il faut savoir viser les pieds et non les hanches, la poitrine ou les genoux… Le lanceur doit pouvoir faciliter le contrôle du ballon par le receveur et favoriser le bon angle pour la sortie de celui-ci ; le tout sous pression.

Longueur, rapidité et intelligence : les trois fondamentaux pour effectuer une bonne touche

Que soit défensivement ou offensivement, la rapidité peut-être une des clefs. Sans ballon, il faut pouvoir marquer rapidement l’adversaire et de la bonne manière en se coordonnant. Avec le ballon, lancer extrêmement vite peut se révéler être un avantage car certains espaces sont susceptibles d'être laissés libres une poignée de secondes. Il ne faut pas le faire automatiquement ni dans une zone sous pression. Il faut savoir attendre que le bon espace se libère avec le bon appel surtout que la règle du hors-jeu ne s'applique pas sur cette phase de jeu ; un joueur pouvant ainsi réaliser un appel dans le dos de la défense adverse.

Le football est une question d’espace et de temps. Les touches en sont un bel exemple. Les partenaires du lanceur doivent être capables de créer de l’espace par des courses. Pour cela, ils doivent savoir quand bouger, combien de temps, où aller, et à quelle vitesse. Il faut pouvoir proposer plusieurs options aux lanceurs pour créer de l’incertitude chez l’adversaire. Il n’est pas nécessaire de construire des schémas bien définis comme dans le basket-ball par exemple. La créativité des joueurs est suffisante à partir du moment où la compréhension des mécanismes de création d’espace est assimilée. Jurgen Klopp est un exemple pour beaucoup de techniciens français notamment pour Pascal Dupraz. Gageons qu’il soit tout aussi inspirant pour les futures touches caennaises !

> L2. J8 - SM Caen (7e - 11 points) / Guingamp (9e - 10 points), samedi 24 octobre à 15 heures au Stade Michel-d'Ornano.

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