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Viviane Asseyi : "Je n’oublie pas d’où je viens, c’est ce qui fait ma force"

Contre la Finlande, mercredi, Viviane Asseyi - en entrant à un quart d'heure de la fin - a honoré sa 54e sélection en Bleue. ©Damien Deslandes

Auteur de 12 réalisations avec Bordeaux, Viviane Asseyi s'est distinguée en inscrivant le plus beau but du championnat selon les followers de la FFF. Son ciseau retourné a été récompensé lors des Trophées de la D1.

Quand on vous dit que vous êtes une joueuse du Bayern Munich, qu’est-ce que cela représente pour vous ? 

"Pour tout vous dire, je n’avais pas forcément en tête un jour de jouer en Allemagne. Mais quand j’ai vu l’intérêt que me portait le Bayern… Le club n’a vraiment rien lâché pour que je signe. Pour moi, c’est un accomplissement. C’est comme un rêve éveillé. C’est un honneur de défendre ces couleurs au quotidien. Franchement, jamais je n’aurais pensé jouer dans un aussi grand club. Comme quoi, il faut croire en ses rêves. Le plus drôle, c’est que petite, le Bayern était mon équipe favorite à FIFA (le célèbre jeu vidéo de simulation footballistique). C’était l’époque des (Franck) Ribéry, (Arjen) Robben, (Philipp) Lahm, (Manuel) Neuer. A la base, je prenais le Bayern pour Neuer, il était trop fort".

"Au Bayern, on a deux fois plus de responsabilités. IL faut se battre pour gagner sa place"

En rejoignant le Bayern Munich en provenance des Girondins de Bordeaux, avez-vous eu le sentiment de changer de dimension ?

"Bien sûr. Au Bayern, on a deux fois plus de responsabilités. On ne s’entraîne qu’avec des internationales, le niveau est incroyablement relevé. Il faut se battre pour gagner sa place. On doit garder une rigueur de tous les instants. Mais c’est comme ça qu’on progresse et qu’on devient plus fortes. On se tire toutes vers le haut".

L’Allemagne, c’est une culture différente par rapport à la France. Il y a également la barrière de la langue. Comment s’est déroulée votre acclimatation dans ce nouvel environnement ?

"La chance que j’ai eue, c’est que l’entraîneur adjoint du Bayern (Jérôme Reisacher) est Français. Au début, sa présence m’a beaucoup aidé. Après, dans l’effectif, toutes les filles parlent anglais, comme moi. J’ai été très bien intégrée. L’ambiance est très cool. Et depuis mon arrivée en Allemagne, deux fois par semaine, je prends des cours pour apprendre la langue. Aujourd’hui, je comprends ce qu’on me dit et j’arrive un peu à m’exprimer".

Qu’est-ce qui vous a surpris en rejoignant le Bayern Munich ? 

"La mentalité allemande ! Au Bayern, on est baigné dans la culture de la gagne. Ça se ressent dans tout ce qu’on fait : sur un entraînement, un tennis-ballon, un match amical… Tout le monde veut tout le temps gagner. C’est comme ça que ce club est devenu un grand club. L’avantage, au Bayern aussi, c’est qu’on ne fait pas de différence entre les filles et les garçons. On n’occupe pas le même centre (d’entraînement) mais on est traités de la même façon. Nous, les Féminines, on dispose d’infrastructures magnifiques. On n’est vraiment pas à plaindre".

"Les filles vont encore râler. A chaque fois qu'on joue en Normandie, je prends toutes les places (rires)"

Parlons de l’équipe de France désormais. Pour la quatrième fois avec les Bleues, vous êtes de retour en Normandie(1) à l’occasion du Tournoi de France…

"Je suis trop contente que la France organise un tournoi à domicile. Je reviens à chaque fois avec plaisir. Même s’il n’y a pas de matches à Rouen, c’est en Normandie, c’est chez moi. Toute ma famille habite toujours dans la région, elle n’a pas bougé (sourire). Les filles de l’équipe de France vont encore râler. A chaque fois qu’on joue en Normandie, je prends toutes les places (rire)".

Vous évoluez désormais à 1 000 km de votre Normandie natale. En dehors de votre famille, y avez-vous gardé des liens ?

"Je suis la marraine de la section féminine de Quevilly. J’ai démarré là-bas. En plus, le club vient d’annoncer qu’il relançait en juin le tournoi qui porte mon nom. Bon, ça tombe pendant la préparation de l’Euro donc j’espère ne pas être présente (sourire). A chaque fois que je rends visite aux filles, elles sont contentes de me voir. Si je peux être un exemple pour elles… J’y étais encore pendant les vacances de Noël, j’ai assisté au derby contre Caen (J19. 2-2, le 21 décembre), le président Mallet m’avait invité. Je n’oublie pas d’où je viens, c’est ce qui me fait ma force".

 

Viviane Asseyi

> Née le 20 novembre 1993 (28 ans) à Mont-Saint-Aignan (Seine-Maritime). 

Attaquante. 1,63 m. Droitière.

Parcours : US Quevilly (2000-2008, équipes de jeunes), FC Rouen (2008-décembre 2009, D2), Montpellier (janvier 2010-2016, D1), Marseille (2016-2018, D1), Bordeaux (2018-2020, D1), Bayern Munich (2020-…, ALL).

Palmarès : championne d'Allemagne 2021.

Internationale française (54 sélections - 12 buts).

Vous avez lancé votre carrière en Normandie. Est-ce que vous aimeriez boucler la boucle en la terminant, par exemple à QRM qui a un projet de monter en D2 Féminine ?

"Comme je vous le disais tout à l’heure, quand j’ai commencé, je n’imaginais pas du tout jouer en Allemagne (elle se trouve sous contrat avec le Bayern Munich jusqu'en juin). Preuve que dans le foot, on ne sait jamais de quoi demain est fait. Maintenant, c’est difficile de se projeter, surtout que je suis une personne qui vit au jour le jour".

"La vérité, je ne regarde pas trop ce qu'il se raconte. Je me concentre sur notre équipe"

Vous y faisiez référence, le championnat d’Europe féminin se déroulera cet été, en Angleterre (6-31 juillet). On imagine que l’objectif sera de s’imposer…

"Avant cet été, il y a déjà beaucoup de matches qui vont avoir lieu avec nos clubs. Maintenant, cet Euro est, bien entendu, dans un coin de notre tête. Entre gagner une compétition avec son équipe nationale et avec son club, je pense que ça n’a pas la même saveur. C’est encore plus beau. Avec son pays, on n’a pas la possibilité de remporter quelque chose tous les ans. Alors qu’avec ton club, si tu te rates une saison, tu peux te rattraper la suivante".

A vos yeux, que manque-t-il à cette équipe de France pour franchir ce plafond de verre des quarts de finale(2) ?

"Sur le papier, que ce soit avant ou aujourd’hui, on a l’une des meilleures équipes. Le problème, c’est qu’on n’a pas été efficace quand il fallait l’être. C’est un travail au quotidien. Maintenant, chaque compétition est différente. On va tout faire pour être au top le jour J. Les critiques de l’extérieur ? La vérité, je ne regarde pas trop ce qu’il se raconte. Je me concentre sur notre équipe, sur le discours de notre coache (Corinne Diacre). Ce qui est important, c’est ce qu’il se passe entre nous, peu importe ce qu’il se dit à l’extérieur".

Même s’il manquait quelques éléments (Wendy Renard, Amandine Henry, Eugénie Le Sommer) lors du dernier rassemblement des Bleues en novembre, derrière Kaditiatou Diani et Griedge Mbock (respectivement 67 et 62 sélections), vous étiez la troisième joueuse la plus capée avec 53 sélections. Est-ce que vous vous considérez comme un cadre de cette équipe de France ?

"Je ne le savais même pas. Vous me l’apprenez. Vous savez, moi, je ne me prends pas la tête. J’essaye d’apporter ma qualité, mon maximum. Mon objectif, c’est d’être appelée le plus longtemps possible en équipe nationale. A la fin de ma carrière, je compterai mon nombre de sélections".

"Ce Mondial a permis de développer notre pratique même si le corona a un peu coupé notre élan"

Quel regard portez-vous sur le développement du football féminin en France ?

"On ne s’attendait pas à ce que la Coupe du Monde (en 2019, en France) soit autant suivie. Ça nous a surpris. Dans la rue, on est de plus en plus reconnues. Cette Coupe du Monde a vraiment permis de développer notre pratique même si le corona (la crise sanitaire de la Covid-19) a un peu coupé cet élan. On espère que ça va reprendre de plus belle".

> Tournoi de France. France - Brésil, samedi 19 février à 21H10 au Stade Michel-d'Ornano à Caen.

(1)Il y a un peu moins d’un an, en avril 2021, les Bleues avaient disputé une double confrontation contre l’Angleterre et les Etats-Unis, à Caen et au Havre. Françaises et Américaines qui s’étaient déjà affrontées au Stade Océane en janvier 2019. Les joueuses de Corinne Diacre s’étaient de nouveau produites dans l’enceinte du HAC quelques mois plus tard, lors de « leur » Coupe du Monde, en juin 2019, en huitième de finale en éliminant le Brésil après prolongation.

(2)L’équipe de France s’est fait éliminer en quart de finale lors de ses cinq dernières compétitions (Euro, Coupe du Monde, JO). Les Bleues n’ont plus atteint le dernier carré d’un grand tournoi depuis 2012 et les Jeux Olympiques de Londres.

Avec le Bayern, une faim de titres

Sous les couleurs du Bayern Munich, Viviane asseyi a décroché le premier titre de sa carrière en étant sacrée championne d'Allemagne la saison dernière. ©Instagram

"On veut tout gagner". Quand on lui demande ses objectifs avec le Bayern, Viviane Asseyi ne passe pas par quatre chemins. Il faut dire qu’en rejoignant la Bavière, l’internationale française a (enfin) goûté à la joie d’un premier titre dans sa carrière. Alors qu’elle a perdu cinq finales de Coupe de France avec Montpellier, la Normande a été sacrée championne d’Allemagne à l’issue de l’exercice 2020-2021. Une ligne au palmarès qui n’a pas rassasié l’appétit de Viviane Asseyi et de ses coéquipières. "Une fois que tu as remporté un championnat, tu as envie d’en gagner d’autres". Mais l’ambition des Munichoises ne se limite pas aux frontières nationales. Dans leur viseur : la Ligue des Champions. "La saison dernière, on s’est fait éliminer en demi-finale après s’être imposées au match aller (par les Anglaises de Chelsea 2-1, 1-4). On l’a toujours un peu en travers de la gorge". Cette année, pour décrocher le Graal, va se dresser sur leur route le Paris Saint-Germain en quarts. Le rendez-vous est fixé pour la fin du mois de mars.

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