C’est certainement l’une des images de ce 8e tour : Romain Guillotte et Benjamin, suspendus malgré les efforts de leurs dirigeants pour faire avancer une rencontre de championnat, tombant dans les bras l’un de l’autre après le coup de sifflet final. "Tu annules tout", adresse le premier au second, en référence à un week-end en famille à Londres, prévu de longue date avant les fêtes de Noël. Mais le 20 ou 21 décembre, l’ex-attaquant de La Maladrerie, à l’instar de tous les joueurs du BFC, a désormais autre chose de programmé. Car en dépit de l’absence de ses deux "meilleures gâchettes offensives", comme les qualifie Eric Fouda, le club du Bessin s’est imposé aux dépens de l’Yvetot AC (1-0), un homologue de la poule de B de Régional 1. Une victoire synonyme de billet pour les 1/32e de finale de la Coupe de France ! Un stade de l’épreuve qu’il n’avait plus atteint depuis 2001 et la réception de Vannes à l’époque, pensionnaire de CFA (défaite 2-0). Mais le sorcier bayeusain a concocté une nouvelle potion magique dont il a le secret.
Pour pallier l’indisponibilité de ses deux titulaires sur le front de l’attaque, il a lancé dans le grand bain Enzo Autin, plus habitué aux joutes de la réserve (R3), tout en repositionnant Théo Le Calvé, traditionnellement dans le cœur du jeu, en soutien du jeune avant-centre. "Un bricolage", pour reprendre les termes d’Eric Fouda qui a porté ses fruits. "Dans cet aménagement offensif, c’est Théo qui marque. Ça signifie que quelque part, ce qu’on a préparé a fonctionné. Tous ces détails sont des signes du destin", n’en revient presque pas le technicien qui avait testé cette formule face à Mondeville, en amical, trois jours auparavant. "On voulait que nos deux attaquants viennent en alternance faire le quatrième au milieu pour compléter le losange, apporter une supériorité numérique pour sortir le ballon proprement. Mais pour que la défense adverse ne soit pas au cadrage de notre joueur qui décroche, il fallait un mec qui nous amène de la vitesse et de la profondeur pour étirer cette défense justement". Le profil d’Enzo Autin. CQFD.
"Dans ma réflexion, à aucun moment, je n'aurais songé à évoluer en attaque"
THéo Le Calvé
L’heureux buteur du soir, lui, ne s'imaginait pas à ce poste. "Quand le coach nous a expliqué son plan de jeu, il nous a indiqué les joueurs qu’il voyait en attaque. Dans ma réflexion, à aucun moment, je n’aurais songé à évoluer devant". Et pourtant… Quand sa frappe en pivot a fait mouche à la 62’ ; sa première réalisation durant cet exercice sous les couleurs « Jaune et Bleu », les sentiments se sont bousculés dans la tête de Théo Le Calvé. "Ce fut assez spécial. J’ai repensé à toutes mes blessures (une pubalgie lui avait notamment coûté une saison blanche en 2024-2025, alors qu’il défendait les couleurs de l’ASPTT Caen). Dernièrement, j’ai été pas mal remplaçant et là, j’ai la chance de disputer un 8e tour, devant tous nos supporters…"
Difficile de rêver plus cadeau d'anniversaire pour « Mimi »
"Je ne sais même pas pourquoi les joueurs me font confiance comme ça. Je leur dis A, ils font A, je leur dis B, ils font B… Ils me suivent", témoigne, ému, Eric Fouda en évoquant "ses grands malades", comme il aime à les surnommer. Fidèle à ses principes, l’entraîneur bayeusain n’a pas négligé le moindre détail dans la préparation de ce rendez-vous, à l’image de cette séance, vendredi, délocalisée sur le synthétique de l’ES Carpiquet qui avait prêté ses installations pour l’occasion. Une surface où se déroulait ce match contre le YAC et qui fait cruellement défaut aux footballeurs du Bessin… pour le moment ! N’est-ce pas M. Tanquerel, 1er adjoint à la mairie, en charge des sports. La solidarité des partenaires de Grégoire Delain et la magie de la Coupe de France se sont chargées du reste. Pour le plus grand bonheur du peuple « Jaune et Bleu ». 450 supporters, répartis notamment dans six bus dont un qui a crevé en route (!), s’étant avalés les 150 bornes les séparant d’Yvetot pour encourager « leur » équipe.
"C'est quand même mieux de tirer une ligue 1 que de retourner chez une R1"
Eric Fouda
Et autant dire qu’au coup de sifflet final, la communion fut belle et… longue entre joueurs, dirigeants et fans du BFC. Personne ne souhaitant quitter l’aire de jeu du Stade municipal de l’avenue Foch ; tout le monde voulant profiter de chaque instant. On n’ose pas imaginer à quelle heure du petit matin s’est terminée la fête du côté du Bessin. Michel Martin, dit « Mimi », lui ne pouvait rêver de plus beau cadeau d’anniversaire. Dans le vestiaire, les coéquipiers de Grégoire Delain, pour qui il est aux petits soins, ne manquent d’ailleurs pas de le saluer en poussant la chansonnette. Mais à peine est-il mis à l’honneur que ce bénévole de toujours, ou presque, a immédiatement une pensée pour les autres, en l’occurrence Oscar Lecanu qui souffle, lui, une nouvelle bougie, ce dimanche. Il est comme ça « Mimi ».
Et maintenant, tous les regards à Bayeux sont braqués vers le tirage au sort, ce lundi, à partir de 19 heures, au Parc des Princes (retransmis sur beIN Sports). Pour le BFC, plusieurs souhaits pour son 1/32e de finale. Tout d’abord, recevoir. "Pour faire la fête à la maison avec tous nos gars", souffle Eric Fouda. Et si possible contre une Ligue 1 : "On veut le plus gros possible, sauf le PSG (sourire)", plaisante le technicien. Car ses joueurs, eux, aimeraient bien l’affronter le dernier vainqueur de la Ligue des Champions. "Si j’avais le choix, je prendrais une Ligue 1 déjà préoccupée par autre chose : le titre, la Ligue des Champions… Plutôt qu’une Ligue 1 qui perçoit la Coupe de France comme d’un tremplin pour l’Europe", poursuit l’ex-coach de Quevilly qui se satisfera de n’importe quel pensionnaire de première division. "C’est quand même mieux de tirer une Ligue 1 que de retourner chez une R1, je ne sais pas trop où". Et en fonction de l’affiche, celle-ci pourrait être délocalisée au Stade Michel-d’Ornano, devant 20 000 spectateurs. Avouez que ça aurait de la gueule.
