Le jour où il a été contacté par les Comores
"J’ai toujours eu la sélection dans un coin de la tête"
Pour Kassim M’Dahoma, défendre les couleurs des « Cœlacanthes » (le surnom des joueurs des Comores) apparaît comme une évidence. "J’ai toujours eu la sélection dans un coin de la tête", confie-t-il. Il faut dire que l’Avranchinais, depuis aussi longtemps qu’il s’en souvienne, a été baigné dans la culture du pays où sont nés ses parents. Alors quand il a été contacté par Djamal Mohamed pour intégrer l’équipe nationale, le défenseur - passé également par Boulogne-sur-Mer, Bourg-Péronnas et Lyon-Duchère - a directement accepté.
"Djamal est de la même génération que mes trois grands frères. Avec lui, c’est comme si j’en avais un quatrième. Il a suivi mon parcours à Côte Bleue, il m’a fait venir à Marseille-Consolat où il est dirigeant avec Nicolas Usaï (le coach de l’époque)", raconte le cadet d’une fratrie comprenant aussi une sœur aînée. Clin d’œil du destin, c’est chez lui, à Marseille, où réside la plus importante communauté comorienne en France, que Kassim M’Dahoma a connu son baptême du feu au niveau international. "C’était le 4 juin 2017 pour un match amical contre le Togo". Une date difficile à oublier.
Le jour où il s'est rendu aux Comores avec la sélection
"Je n’étais pas revenu depuis plus de dix ans"
Si sa première cape fut évidemment un moment chargé en émotions, cela n’a rien de comparable avec son retour aux Comores avec l’équipe nationale, dans le cadre des éliminatoires de la CAN 2019. "Je n’étais pas revenu au pays depuis plus de dix ans. J’ai encore énormément de famille là-bas : ma grand-mère, des tantes, des oncles… La dernière fois qu’ils m’avaient vu, j’étais tout petit. Et là, quand je reviens, je mesure presque deux mètres (sourire)". Sur place, Kassim Mdahoma a pu également juger de l’engouement populaire suscité par les « Coelacanthes ». "Franchement, il faut le voir pour le croire. C’est beau. Tout le monde est à fond derrière la sélection. Dès l’arrivée à l’aéroport, il y a du monde partout, de tous les âges. J’ai vu des mamies pouvant à peine marcher se rendre au stade. Avec nos résultats, on rend fier notre peuple". Sportivement, ce retour aux sources a nécessité un temps d’adaptation, surtout sur le plan climatique. "Pour ma première sélection aux Comores, bien qu’il pleuvait, il faisait tellement chaud que j’ai failli tomber dans les pommes à la mi-temps".
Le jour où les Comores se sont qualifiés pour la CAN
"Je ne peux même pas expliquer ce que j’ai ressenti"
Pour la première fois de leur toute jeune histoire*, les Comores vont donc participer à une CAN ; une compétition élargie à 24 nations depuis l’édition précédente, en 2019. "Le plus grand moment que j’ai vécu avec ma sélection, c’est quand on s’est qualifié. Je ne peux même pas expliquer ce que j’ai ressenti. Dans le stade, c’était de la folie", n’en revient toujours pas Kassim M’Dahoma. Ce billet, les « Cœlacanthes » sont allés l’arracher aux dépens du Togo ; leur bourreau lors des qualifications à la Coupe du Monde 2022. "Cette élimination nous a fait mal mais ça nous a aussi permis de grandir". Dans une poule où figuraient également l’Egypte de Mohamed Sala et le Kenya, les hommes du sélectionneur Amir Abdou ont parfaitement lancé leur campagne en dominant le Togo, chez lui, 1-0 grâce à un but de l’ancien lorientais Faïz Selemani.
"Après ce premier match, on savait qu’on pouvait le faire", assure celui qui a signé à l’US Avranches l’été dernier. 24 mois plus tard (!) ; le calendrier ayant été décalé à cause de la pandémie de la Covid-19, les Comores ont définitivement validé leur ticket, suite à un résultat nul contre ce même Togo (0-0), devant leur public, à Moroni. Que de chemin parcouru pour la 132e nation au classement Fifa en l’espace d’une dizaine d’années. Kassim M’Dahoma peut en témoigner : "Je me rappelle, quand j’étais adolescent, lors d’une colonie de vacances avec mon club de l’époque, j’avais assisté à un match amical entre Istres et des joueurs comoriens vivant en France. C’étaient les débuts de la sélection".
*Indépendants de la France depuis 1975, les Comores n’ont été reconnus par la FIFA qu’en 2005, disputant leurs premiers matches internationaux en décembre 2006.
Pour voir les huitièmes, les Comores doivent impérativement battre le Ghana
Grâce à leurs performances ces dernières années, les Comores ont gagné le respect sur le continent africain. "C’est vrai qu’on suscite un peu de crainte", estimait Kassim M'Dahoma avant le tournoi. "On a un groupe bosseur, qui se connaît bien maintenant. On est tous des frères, solidaires. Dans ces conditions, c’est plus facile d’avancer". C'est pourquoi, à l'heure de prendre part à la première CAN de leur histoire, les « Coelacanthes » nourrissaient certaines ambitions. Et peu importe d'avoir hérité du "groupe de la mort", comme le qualifiait Kassim M'Dahoma, avec le Gabon, le Maroc et le Ghana.
"Pas question de faire de la figuration. On a parfaitement conscience que ça ne va pas être facile mais nos adversaires savent aussi que ce n’est pas gagné d’avance contre nous", prévenait le défenseur de l'US Avranches, titulaire lors des deux premières journées. Mais la réalité du terrain a ramené les Comores sur terre avec deux défaites contre le Gabon (1-0) et le Maroc (2-0). Conséquence, les « Coelacanthes » doivent impérativement s'imposer aux dépens du Ghana, ce mardi soir (coup d'envoi à 20 heures), pour garder une infime chance de se qualifier en huitième de finale*. "Vous savez, sur une compétition, tout peut arriver, surtout en Afrique, sur des matches un peu pièges". Alors, pourquoi pas...
*Outre les deux premiers de chacune des six poules, les quatre meilleurs troisièmes se qualifient également pour les huitièmes de finale.