Il fut un temps où, à l'US Avranches, on aimait à dire que le moteur de l'équipe première, c'était tout simplement le président Gilbert Guérin en personne. Seulement, l'emblématique président n'est plus et la saison passée, marquée par son décès brutal, a aussi vu le club retomber en National 2 après dix ans de présence ininterrompue en troisième division. Dès lors, la réalité tant sportive qu'économique a tout à coup changé sur les hauteurs de la baie du Mont-Saint-Michel. "Maintenant, on a des modèles économiques dans les clubs qui sont très compliqués", expose Nicolas Leroux en faisant aussi référence à ce qui se trame dans les échelons du dessus. "Aujourd'hui, pour le niveau National 2, c'est vrai qu'au lieu de ne recruter que des joueurs de l'extérieur avec les salaires qui vont avec, il va falloir taper un peu dans le vivier du club et essayer de former encore mieux qu'avant." Ces dernières années, outre les rares cas Bastien Launay, Mathis Lemeray et dernièrement Nolan Hamard (tous partis aujourd'hui), il est vrai que l'équipe première laissait peu de place aux jeunes du cru, mais cette réalité devrait vite voler en éclats.
On l'a souvent écrit sur notre site : l'US Avranches ne part pas de zéro sur le plan de la formation, loin de là. Ses équipes de jeunes évoluent depuis plusieurs saisons dans les championnats U17 et U19 nationaux et la section sportive du tout proche lycée Emile-Littré est un réel atout. Désormais, eu égard à la conjoncture actuelle, l'idée est de consolider la passerelle entre les jeunes et les seniors. "On a commencé à y réfléchir en fin de saison dernière parce que l'objectif, c'est de pouvoir identifier plus vite les profils à même d'intégrer à moyen terme les effectifs de la N2, de l'équipe première", détaille Kévin Leroux, l'entraîneur de la réserve qui évolue en Régional 1. "On veut que les premiers matches dans le football des adultes se fassent avant leur première année de senior".
"au lieu de ne recruter que des joueurs de l'extérieur avec les salaires qui vont avec, il va falloir taper un peu dans le vivier du club"
Nicolas Leroux
Pour accompagner ce processus, sous la gouverne notable de Cédric Le Gall et Jérémie Maccio, le club du Sud-Manche a donc lancé une section Elite après une restructuration en interne. "Avec Morgan Coursin (président de l'association de l'USAMSM), Alain Mahaut (vice-présent), et Xavier Gravelaine qui est le coordinateur technique, on a mis en place une équipe Elite", poursuit Nicolas Leroux. "Le but est justement de décloisonner un petit peu les catégories, les U19, les U17 et les seniors. On veut que les cinq meilleurs joueurs de U19, par exemple, puissent pourquoi pas s'entraîner avec la R1 déjà, voire la N2". À Avranches, on veut aller plus vite dans l'analyse des profils et du potentiel de chacun, afin d'optimiser les joueurs et d'aller encore plus loin avec eux. "On veut pouvoir proposer une passerelle à nos jeunes, un sas, pour que l'atterrissage là-haut soit le moins difficile possible pour eux", abonde Kévin Leroux.
Les U18 comme symbole d'une jeunesse prometteuse
Cette saison, si les U17 Nationaux d'Avranches sont à la lutte pour le maintien, les U19 sont solidement installés dans le ventre mou de leur poule et viennent d'infliger un cinglant 5-1 au club professionnel du Stade Brestois. Et évidemment, les U18 d'Emilien Joba constituent un bel exemple de la bonne santé du club en termes de formation et de la qualité des éducateurs eu égard à ce 1/8e de finale (record historique égalé) qui s'annonce ce week-end du côté de La Maladrerie OS. "Les U19 Nationaux, les U17 Nationaux, pour un club comme Avranches, les maintenir depuis tant d'années, c'est un petit exploit tous les ans", salue d'ailleurs le président. Pour autant, quand bien même les jeunes joueurs semblent maîtriser leur sujet dans le championnat de leur âge, le passage chez les seniors constitue le plus souvent une étape redoutable et l'écart en termes de niveau peut souvent être très déroutant pour un joueur encore à l'étape de la formation.
"Peut-être que l'année prochaine, pour la première fois en N2, il y aura directement des joueurs qui seront U19 et pas U20"
Kévin Leroux
"Un jeune ne peut pas performer de manière régulière en arrivant en senior, il va faire des erreurs, donc ça, il faut l'accepter", rappelle Kévin Leroux. "Ça va plus fort, les contextes sont différents, les matches sont sur herbe par exemple (...) Les impacts aussi sont différents, l'expérience des joueurs en face est différente. Ils se retrouvent à jouer contre des joueurs qui ont du vice, des joueurs qui ont le même parcours qu'eux en jeune mais qui ont dix ans de plus". Voilà pourquoi le groupe Elite de l'US Avranches prend tout à coup tout son sens. "Plus vite, on va se confronter à plus fort, plus expérimenté, et un contexte qu'on aura sur les 15 prochaines années de sa carrière, plus vite, on va se développer, pour moi, c'est une évidence".
Dans un passé récent, un jeune de l'US Avranches pouvait trouver illusoire de viser l'équipe première tant le niveau paraissait hors de portée. Même si le club rêve toujours de retrouver au plus vite la place qui était la sienne pendant une décennie, le National 2 a fatalement réduit les écarts. "On veut essayer de donner au moins une vision, un objectif pour nos jeunes, pour les conserver aussi, pour les garder", complète Nicolas Leroux. "On veut pouvoir leur dire : « Le niveau national, pour certains d'entre vous, c'est possible ! » Et ça passe par des paliers". Pour l'heure, ce changement de cap se veut surtout organisationnel et politique. En d'autres termes, le club n'a pas vraiment les moyens d'engager plus d'éducateurs pour renforcer l'accompagnement de ses jeunes pousses. "On n'est pas loin de 100 000 € (consacrés à la formation). Ce n'est pas revu à la hausse, parce qu'en fait, on a les personnes en place, et on s'est dit qu'il fallait changer notre regard et notre façon de faire". "Peut-être que l'année prochaine, pour la première fois en N2, il y aura directement des joueurs qui seront U19 et pas U20. Peut-être qu'on aura gagné six mois. C'est tout l'intérêt de basculer sur un projet d'alimenter l'équipe première". Rendez-vous donc dans quelques mois pour cueillir les premiers fruits de cette nouvelle méthode.
> Coupe Gambardella. 1/8e de finale - La Maladrerie OS (R1) / US Avranches (Nat), dimanche 2 mars à 14 H 30 au Stade Joseph-Déterville.